Mais qui était-il ?

Raymond Crocotte, la légende

Qui était Raymond Crocotte ?

Malgré une vie hors du commun et une production artistique quasi stakhanoviste, peu nombreux sont ceux qui connaissent le nom même de Raymond Crocotte, en l’honneur de qui la compagnie a été fondée. Vous nous posez souvent la question : qui est Raymond Crocotte ? C’est une question difficile, car la personnalité haute en couleur qu’était le dramaturge le rapproche également des aventuriers qu’il aimait à côtoyer.

Les sources fiables sur son existence sont rares, aussi sommes-nous souvent réduits à des conjectures.

Raymond Crocotte, courte biographie d’un grand artiste

On ne sait pas vraiment d’où est originaire Raymond Crocotte. Il naît probablement à Rio de Janeiro à la fin du XIXe siècle, du moins c’est ce que les témoignages de ses proches semblent attester. On entend parler de lui la première fois en 1922 quand il présente un texte à la Sorbonne, La Polonaise, que la critique rejettera violemment. Elle fut jugée contraire aux bonnes mœurs. Mais le personnage de Raymond Crocotte lui-même fait débat. Homme à femmes, il multiplie les conquêtes et les scandales. On le dit alcoolique.

Raymond Crocotte voyage beaucoup, il côtoie de nombreux aventuriers dans l’entre-deux-guerres, participe à l’aventure de l’aéropostale en écrivant quelques lettres à sa mère restée à Rio, qui feront partie des premières à traverser l’Atlantique. Grand admirateur de Byron, il visite souvent Venise, et on retrouvera même une pièce inachevée écrite en anglais : The Glorious Georges, un drame social dont il abandonna l’écriture pour une raison inconnue.

Son goût du voyage et de la découverte lui permet d’apprendre sept langues qu’il parle couramment : français, anglais, espagnol, allemand, russe, mandarin, hébreux. On retrouvera diverses correspondances dans ses écrits privés, rédigées dans ces langues.

Durant la Deuxième Guerre, il disparaît de la circulation. On n’apprendra que bien plus tard son implication dans l’organisation des maquis du sud-ouest de la France où vivait sa troisième femme, Josiane Grifon, fusillée par les nazis en 1943.

Sa production artistique ne faiblit pas, même pendant ces années sombres. Comme il collectionne les femmes, il touche à toutes les formes d’art : peintre, sculpteur, dramaturge, poète, acteur lui-même, musicien (accordéon, contrebasse et xylophone), il dévore tout, en véritable boulimique.

Après la guerre, il retourne en Amérique du Sud où il contracte la malaria.

Il aimait les chats, les poissons rouges, la vodka et la musique baroque.

Brusquement, il disparaît sans laisser de traces lors de la nuit de Noël en 1973. Son œuvre immense est gérée dès lors par une petite étude notariale suisse alémanique qui entreprend de retrouver les légataires potentiels en même temps que les trois ex-femmes survivantes de Raymond Crocotte engagent des détectives privés à travers les cinq continents pour retrouver leur pygmalion.

On croira ainsi retrouver sa piste en Argentine, aux îles Caïman, dans un temple bouddhique au Népal, ou à New York dans un club de jazz très connu.

Quelques œuvres de Raymond Crocotte

La Polonaise (1922, Théâtre de la Sorbonne, Paris), manuscrit très détérioré en cours de restauration.

Le complexe du poisson rouge (1923, Théâtre National de Bruxelles).

Cyrille et l’Énergumène.

Comment la Tante Amalia gagna la vie éternelle (1925). Pièce tragico-tragique sur fond de quête spirituelle représentée au Théâtre de la Neva à Moscou en 1925 avec la grande Maria Glikoria Anissimova dans le rôle de Tante Amalia. Mise en scène Vassili Vassiliev Vassilievitch, son amant.

Le Monsieur moustachu du Café d’en face (1934). Pièce de boulevard représentée avec un immense succès durant cinq ans (à partir du printemps 1934) à Paris au Théâtre des Folies Pigalle avec le grand comique Marcel Galopiot dans le rôle d’Évariste Letruchon (le monsieur moustachu du café d’en face). Bizarrement, cette pièce a été subitement retirée de l’affiche en septembre 1939, des commentateurs de l’époque ayant évoqué une ressemblance avec un autre moustachu (acteur montant de la scène internationale qui malgré une carrière tonitruante s’est révélé beaucoup moins drôle que notre Marcel Galopiot…).

Soliloque ou pièce à une voix (1952). Monologue pour un homme (ou une femme) et un xylophone (ou une balalaïka). Essai théâtral mis en espace au Théâtre Henrik Ibsen de Copenhague en 1971 par le Groupe Théâtral Espace Vide. Commentaire d’un critique de l’époque : « C’est du théâtre intimiste pour public minimaliste. » Qu’a-t-il voulu dire ?

Pourquoi une Compagnie Raymond Crocotte ?

En 2003, après l’expiration du délai légal suisse, Raymond Crocotte est présumé mort, et l’héritage revient à une lointaine descendante, habitant Toulouse dans le sud-ouest de la France. Le legs contient des manuscrits originaux des œuvres de Raymond Crocotte.

Ne pouvant se résoudre à laisser ce formidable potentiel artistique oublié dans un carton, elle parvient à regrouper autour d’elle une troupe enthousiaste de jeunes comédiens, prêts à faire un long travail d’adaptation (les feuillets sont pour la plupart écrits en russe ou en espagnol).

En attendant que ce travail de traduction soit achevé, la troupe a décidé de monter des pièces d’auteurs plus communs.